Satchel Paige joue enfin en MLB – Partie 2

Enfin, la suite de l’odyssée de Satchel Paige ! Honus vous invite à lire la première partie écrite il y a bien longtemps… Pour résumé, Satchel Paige a été le plus grand lanceur du baseball et n’a jamais pu lancer dans les ligues majeures, réservés aux blancs. Mais les choses allaient enfin changer…..

On avait quitté le Grand Satchel Paige en 1947. Jackie Robinson a été ainsi le premier joueur noir à être signé dans les ligues Majeures. Jackie Robinson, qui n’avait encore rien prouvé, avait été donc préféré au Grand Satch…. Ecarté de la course comme un vestige du passé. Satch va voir d’autres joueurs noirs signés en 1947, le grand champ centre Larry Dobby signé par les Cleveland Indians, Hank Thompson et Willard Brown par les St Louis Browns. Lors de la saison 1948, c’est (enfin ) au tour du fameux catcher Roy Campanella signé par les Dodgers et qui entre dans le show. Pour Satchel Paige, il est toujours pitcher pour les Kansas City Monarchs, l’équipe la plus forte des Negro Leagues, et du haut de ses 42 ans, Satch sent que le destin lui a joué un mauvais tour.

La surprise va alors venir de ….. Bill Veeck. Oui, l’homme qui a eu l’idée de faire jouer un nain Eddie Gadeal en 1951, celui qui a eu l’idée d’une soirée de bière à 10 cents, celui qui a promu les bermudas comme tenue de jeu des White Sox….. Bill Veeck un homme donc à la recherche du coup médiatique !

En 1948, Bill Veeck est le propriétaire des Cleveland Indians, et l’équipe se présente comme très compétitive cette année. C’est l’été et Bill Veeck est bien conscient que son équipe manque néanmoins de lanceurs de talent pour l’aider dans la course aux play offs. Veeck se rappelle du duel Dizzy Dean / Satchel Paige en 1934 « l’un des plus grands duels de lanceurs jamais vu », et se demande si Paige lance toujours. On lui dit que oui, et qu’il est "toujours aussi bon"… Il sait néanmoins que sa signature sera compliquée, Lou Boudreau le manager joueur de l’équipe ne voulant certainement pas d’un joueur aussi vieux, qu’importe l’aura qui entoure le grand Paige.

Veeck explique à Boudreau "je te dis qu’il doit lancer" 

Mais Veeck a un plan. Veeck contacte alors Lou Boudreau pour une session d’entrainement secrète le soir du 6 juillet 1948. Boudreau se demande bien ce qu’il vient faire là, il frappe pour .360 à cette période, mais enfin, il s’exécute. Bill Veeck lui annonce la surprise, tu vas catcher un peu Paige qui vient sur le monticule. Boudreau se demande si c’est bien sérieux. 50 lancers plus tard dont la totalité sont des strikes, Satchel Paige demande à Boudreau de mettre une fourchette là où il veut sur la plaque. Satchel Paige lance alors 10 lancers et frappe 9 fois la fourchette. Lou Boudreau place alors la fourchette de l’autre côté de la plaque et, même sentence, 7 lancers touchent la fourchette. Boudreau est pour le moins impressionné par le contrôle du grand Satch.

Veeck demande par la suite un affrontement lanceur batteur. Boudreau swing en tout 19 fois et ne frappe pas une balle qui ressemble à un hit…. Bill Veeck sait qu’il a réussi son pari. Le lendemain, Satchel Paige est signé chez les Indians pour 10 000 dollars avec l’aval de Lou Boudreau.  Il a 42 ans, et c’est la surprise chez les journalistes qui envahissent le ball club.

Satch montrant à Veeck son lancer "mystère"

Connaissant Bill Veeck, les journalistes suspectent Paige d’être un nouveau coup de publicité dont il est très friand. Certes, Paige a dû être un grand lanceur, mais le signer à 42 ans, c’est du grand n’importe quoi. Veeck répond très simplement que « si Paige est signé, c’est qu’il peut apporter beaucoup à son équipe. S’il était blanc, cela ferait 25 ans qu’il lancerait dans les ligues majeures ».

Paige est de son côté très serein quant aux questions des journalistes « vous savez cela fait plus de 20 ans que je lance des strikes. Une chose de sure, je n’aurai peur de personne qui se présente dans la boite, je suis dans le jeu depuis trop longtemps pour ça… »

Paige après tout contrôle 7 lancers dans son arsenal, 3 lancers de trois quart, (« Sidearm Curve, Sidearm Sinker, Siderarm Fastball »), et 4 Lancers par-dessus (« speedball, curve, drop » ainsi qu’une Knuckleball que Cool Papa Bell lui a appris, qu’il peut lancer à l’occasion).  Surtout, il alterne motion rapide, semi lente, dont la célèbre "Hesitation Pitch", qui trompe toute synchronisation possible des frappeurs.

Paige va débuter le 9 juillet 1948 sur le monticule en relève de Bob Lemon en 5e manche. Paige va se montrer intraitable sur 2 manches. Le première base des Browns frappe une line drive mais rien de plus. Le match est perdu mais Paige a montré qu’il avait le talent pour lancer à ce niveau.

Le 15 juillet 1948, seconde opportunité, il rentre en relève en 6e manche, prend un home run mais termine le match et remporte sa première victoire face aux A’s de Philadelphie. Lou Boudreau apprécie les qualités de son lanceur « il a été mis sous pression et il s’en est bien sorti ».

En aout, il entre dans la rotation et la foule commence à l’attendre. Plus de 72 000 spectateurs sont au stade pour son premier départ où il gagne les Washington Senators. On est à plus de 78 000 fans pour le match du 20 août contre les White sox. Le 30 août, il a une fiche de 4-0 en tant que starter. Il a un peu de mal à finir les parties en tant que starter, non en raison de son bras, mais souffrant souvent de douleurs au ventre qui l’obligent à sortir du match.  

Lorsqu’on demande à l’arbitre Bill Summers ce qu’il pense de Paige, « il y a peu de meilleurs lanceurs actuellement dans la ligue. Et même, ce n’est pas sur. Il a une slider et une courbe explosives. Et tout ca arrive très vite. Vous souhaitez d’autres infos sur lui ? ».

Paige finit la saison régulière avec une fiche de 6-1, et avec son ERA de 2,42, il a largement contribué au succès des Indians. Ces derniers vont finalement jouer les Boston Braves en World Series. Paige ne startera pas dans cette série mais entrera en relève dans le match 5, brisant l’élan de Boston ! Il devient alors le premier laceur noir à avoir lancé en World series.Cleveland gagne la série lors du 6e match, et Paige se retrouve dés sa première saison vainqueur du trophée ultime des majeures. Le destin semble avoir finalement souri au grand Satch.  

Paige est favori pour le titre de "Rookie of the year" de la saison, mais au vu de son âge, et surtout de son parcours, lui donner le titre semble totalement déplacé et on lui préfère pour raisons diplomatique Alvin Dark des Boston Braves.

L’histoire n’est pas finie. Veeck prend le contrôle en 1949 de l’équipe des Browns de Saint Louis, totalement à la dérive, et va imposer à nouveau la signature de Satchel Paige en 1951. Le grand Satch va lancer trois saisons pour eux, et va présenter une fiche de 16-23, ce qui n’est pas si mal pour une équipe qui perdra en moyenne plus de 95 fois par saison durant la période.  Paige est une figure du baseball majeure et il fait même de la publicité pour la firme Coca Cola.

Paige se retire « officiellement » du show à l’âge de 47 ans en 1953.  Ce qui ne l’empêche pas de lancer encore pour les Marlins de Miami, alors une équipe de minor league.

Mais en septembre 1965, le propriétaire des Kansas City Athletics Charles Finley pense à lui pour un petit coup de publicité. Depuis leur départ de Philadelphie, les Athletics enchaînent les saisons catastrophiques. Satchel Paige a toujours été le grand lanceur de la région de Kansas City, et Finley se dit qu’il n’a rien à perdre. Paige est cependant affaibli, il a 59 ans, il porte désormais des lunettes.  Paige n’a cependant rien perdu de sa grande bouche. Quand Finley lui demande s’il peut lancer encore 3 manches, il lui répond « Ben ça dépend. Combien de fois par jour ? ».

Au vu de son âge, on oblige à la présence d’une infirmière qui l’accompagne durant le match ! Paige se retrouve comme un roi assis dans un fauteuil rocking chair dans le bull pen !

Et le 25 septembre 1965, on l’envoie sur le monticule en relève contre les Red Sox de Boston. Carl Yastrzemski frappe un double mais ça ne causera pas plus de dommage, le frappeur suivant frappant un fly étant trompé par le fameux « hesitation pitch ». Paige retire les frappeurs dans l’ordre lors de la 2e et de la 3e manche.  Il gardera le monticule jusqu’à la fin du match, ne prenant qu’un hit en 3 manches, et ce, en 28 lancers.  Le catcher de Kansas résuma sa performance « il lançait lentement, puis très lentement, et il a réussi à tous les avoir ». Il sort sous les applaudissements de la foule.

Fin du show pour de bon. A 59 ans, Satchel Paige a encore montré que son talent était juste hallucinant.

Il sera élu au Hall of fame dés 1971. Premier lanceur noir à être élu, et certainement l’un des meilleurs lanceurs de l’histoire de ce sport.  

BHONUS 

Une vidéo ultra rare de 1948 où l’on voit Satchel Paige lancer ! 

 

Et quelques photos Bhonus de Satchel Paige assez géniales !

 

 

 

 

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